Il y a les vagabonds joyeux, rieurs, farceurs.
Il y a les autres, les grincheux, les teigneux.
Il y a celui dont personne ne connaît l’identité. Quand on le voit on dit «Attention, c'est Séchoir» .
Grand, costaud, que du muscle, mince et voûté, Séchoir ne parle à (presque) personne. Dans l’échange inter-humain, on le qualifiera de minimaliste.
Il doit son surnom au fait qu’il a été vu à plusieurs reprises sortant d’un tunnel portant lui-même le nom du lieu-dit « Le séchoir ». N’y a-t-on pas également retrouvé de vieilles guenilles jonchant le sol du tunnel.
Séchoir est un vrai vagabond. Sans attache aucune, il passe d’une ferme à une autre à offrir ses services pour de menus travaux. Dormir dans un lit, il ne connaît pas et d’ailleurs il refuserait. « La grange ou l’écurie, ça ira » dit-il. Il y trouve la chaleur nécessaire préférant être avec les vaches qu’avec les humains.
Quarante ans ont passé. Grand Papa raconte l’histoire de Séchoir à son petit-fils. Au bout du chemin apparaît une silhouette.
« Tiens, quel hasard, » dit le grand-père, « c’est extraordinaire, je te parle de Séchoir et le voilà… là-bas… toujours la même allure en plus vieux. »
« Oh, je le connais » dit l’enfant, « c’est l’homme des bois. Il fait peur à tout le monde. »
« Pauvre Séchoir, toi qui n’a jamais fait mal à une mouche, te trimballer avec une telle réputation. L’ère des vagabonds a bien changé » pense le grand-père.