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  • Le quatrain de la semaine

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  • les petites histoires de Gabby: 69.VINCENT

    Vincent, au contraire de « l’homme des bois », est lui, « l’homme de la rivière », ou, devrions nous dire « l’homme des rivières ».

    On ne pourra jamais dire de ce vagabond à l’allure digne qu’il a les pieds sales, qu’il pue des pieds. Il n’est pas un jour, hiver comme été, où il ne trempe ces « porte-bête » comme il appelle ses pieds dans un ruisseau, une rivière ou un étang.

    « Je suis un homme de flotte qui préfère le vin. Le gros rouge pour le gosier et l’eau courante pour le pied » dit-il de son air taquin.
    « Et l’eau bénite pour les curés » rajoute-t-il aussi aussitôt pour bien signifier son côté anticlérical.

    Vincent n’aime pas les curés depuis que l’un d’entre eux, voulant lui faire la leçon, l’a dénoncé à la maréchaussée pour braconnage de truites.
    « Il est jaloux car je ne lui en ai jamais porté sur sa table de bouffeur d’hosties » grogne-t-il.

    « T’iras quand à la mer ou au lac ? » aimaient lui demander les enfants.
    « Jamais ! J’irai jamais au lac ! De l’autre côté, c’est trop loin et la mer, on n’y voit rien, c’est bouffé par des vagues grosses comme des maisons ».

    Le grand bonheur de Vincent, c’est d’être seul, les pieds nus, et étendu à l’ombre des saules pleureurs et d’écouter tous les concertos et toutes les symphonies qui lui procurent le ruissellement de ses rivières bien aimées.

  • Le quatrain de la semaine

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  • les petites histoires de Gabby: 68.TULIPE (MÉTIER, MÉTIER)

    Les villes les plus chaleureuses sont celles qui ont une bonne proportion de marginaux. Ne jamais perdre de vue que ce n’est pas l’être qui se met en marge, mais que c’est la société qui marginalise.

    Le marginal est aussi appelé : fou, simple d’esprit, original, libre penseur, handicapé, excentrique, nègre ou étranger.

    Toutes les têtes qui dépassent de la norme seraient déclarées marginales. Il y a les très visibles et les moins visibles. Les moins visibles essaient souvent de se cacher. Les plus visibles devraient pouvoir compter sur la gentillesse et la compréhension des gens dit « normaux ».

    Les simples d’esprit portent le même fardeau que les torturés des méninges, que les compliqués.

    Tulipe est un simple travailleur à l’esprit simple. On dit qu’il n’a pas inventé la poudre (nous non plus par ailleurs) mais que c’est un joyeux luron. Il a un défaut de prononciation et répète souvent la même chose. Il faut bien qu’il travaille, mais il préfère le bistrot. L’a-t-on déjà vu saoul? Tulipe a son surnom Tulipe et aux mots qu’il répète pour affirmer ses paroles « métier- métier » ce mot répété signifie qu’il sait de quoi il parle. Il veut nous dire : « je connais le métier, j’ai du métier ».

    Depuis peu, son copain Jules l’appelle « Marguerite ». « C’est pour changer » dit-il. Tulipe a dit à Jules qu’il aimait : « Ça fait classe, Marguerite et ça fait moins hollandais - métier, métier. »

  • Le quatrain de la semaine

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  • Les petites histoires de Gabby: 67.L’HOMME DES BOIS

    Il y a les vagabonds joyeux, rieurs, farceurs.

    Il y a les autres, les grincheux, les teigneux.

    Il y a celui dont personne ne connaît l’identité. Quand on le voit on dit «Attention, c'est Séchoir» .

    Grand, costaud, que du muscle, mince et voûté, Séchoir ne parle à (presque) personne. Dans l’échange inter-humain, on le qualifiera de minimaliste.

    Il doit son surnom au fait qu’il a été vu à plusieurs reprises sortant d’un tunnel portant lui-même le nom du lieu-dit « Le séchoir ». N’y a-t-on pas également retrouvé de vieilles guenilles jonchant le sol du tunnel.

    Séchoir est un vrai vagabond. Sans attache aucune, il passe d’une ferme à une autre à offrir ses services pour de menus travaux. Dormir dans un lit, il ne connaît pas et d’ailleurs il refuserait. « La grange ou l’écurie, ça ira » dit-il. Il y trouve la chaleur nécessaire préférant être avec les vaches qu’avec les humains.

    Quarante ans ont passé. Grand Papa raconte l’histoire de Séchoir à son petit-fils. Au bout du chemin apparaît une silhouette.
    « Tiens, quel hasard, » dit le grand-père, «  c’est extraordinaire, je te parle de Séchoir et le voilà… là-bas… toujours la même allure en plus vieux. »
    « Oh, je le connais » dit l’enfant, « c’est l’homme des bois. Il fait peur à tout le monde. »
    « Pauvre Séchoir, toi qui n’a jamais fait mal à une mouche, te trimballer avec une telle réputation. L’ère des vagabonds a bien changé » pense le grand-père.

  • Le quatrain de la semaine

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  • Les petites histoires de Gabby: 66.BISQUIT

    À cette époque, il n’y avait pas de mendicité dans les rues. Ça ne se faisait pas de tendre la main «à votre bon cœur m’sieurs dames».

    Dans la petite ville proprette et tout et tout, diverses institutions avaient leurs pauvres dont elles s’occupaient avec une certaine discrétion. «Restez à la maison. N’allez rien crier sur les toits. Arrêtez de boire et on vous donnera» disaient les gens bien intentionnés aux relents âcres de paternalisme.

    Les laissés-pour-compte vaquaient à leurs occupations de laissés-pour-compte. Les quelques clochards devenus teigneux étaient méprisés. «Va donc sonner ailleurs» qu’on leur criait dessus. «Si t’allais travailler, tu serais pas dans la merde !» était la litanie qu’ils connaissaient par cœur.

    Mis à part tout ce beau monde, occupant l’organisation de la cité, il y avait les vagabonds.

    Mis à part les toujours redoutables bien pensants, les vagabonds étaient aimés. Les enfants leur couraient après et les épris de liberté et de poésie cherchaient à leur faire la conversation.

    Un des plus connus à cette époque était «Bisquit». Il apparaissait de ci de là au gré des saisons, un sac de jute (sac de pommes de terre) sur l’épaule. Il connaissait les endroits où il pourrait remplir les boîtes de conserve vides qu’il trimballait et de disparaître à nouveau vers d’autres espaces de liberté.  

    «T’as quoi dans ton sac ?» demanda l’enfant à Bisquit. «J’ai des poupées pour les filles et des trains électriques pour les garçons» disait-il toujours, «et je te les apporterai à Noël si t’es bien sage»

    Avant de quitter son auditoire, il disait encore : «T’as quinze pour faire vingt ?»