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Les petites histoires de Gabby: 64.PÉPAING
Pour rencontrer Pépaing, ce n’était pas bien compliqué.
Le lundi après-midi, il se promenait dans le haut de la ville sur ce sentier piétonnier bordé de peupliers.
« Salut Pépaing, comment ça va ? » lui criaient ceux qui n’avaient pas le temps de s’arrêter.
« Comme un lundi qui attend le mardi » répondait inlassablement Pépaing d’une voix forte. Pépaing était devenu sourd d’une oreille suite à un coup de canon tiré près de lui lors d’une fête champêtre.Le mardi, Pépaing partait dès le matin, sac au dos, « faire sa belle tournée » comme il aimait à le dire. Arpenter les bords de la rivière encore sauvage, pique-niquer au grand air, tel était le monde de Pépaing cela par n’importe quel temps.
« Il n’y a pas de beau ou de mauvais temps pour les belles choses » aimait-il à dire.Mercredi et jeudi, c’était le train pour quelque part. Il disparaissait.
Le vendredi, jour du poisson, il prenait son repas dehors.
« Ça change les idées »Le samedi, il ne ratait jamais le grand marché du samedi et le dimanche il allait à la messe à la cathédrale.
« C’est tellement beau » soupirait-il.Pour ses copains, Pépaing était, pour sûr, un sage. Ne puisait-il pas le gros de sa philosophie dans l’esprit du vin et de la tisane Blancpain ? À l’enterrement de monsieur Raoul Dorsat, il n’y eut guère de monde. Personne n’avait eu l’idée d’ajouter sur l’avis mortuaire son surnom : Pépaing.
P.S. Pépaing vient du mot pépin, mais avec un accent.
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le quatrain de la semaine
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Les petites histoires de Gabby: 63.TANTE ROSE
Le petit garçon âgé de… (son âge n’ayant aucune importance, je ne le donnerais pas).
Le petit garçon n’avait pas eu de grand-mère, ni de grand-père ou alors ils étaient morts bien avant sa naissance…Il vivait avec sa maman et une petite sœur qui ne l’intéressait pas trop.
« Les filles, ça joue seulement à la poupée et ça pleure et … ça n’a pas de force », disait-il à sa maman lorsqu’elle essayait de les faire jouer ensemble.Son papa mourut lorsqu’il venait d’avoir six ans. Il avait bien quelques oncles et tantes, cousins et cousines du côté de la famille de son papa, mais il ne les voyait guère.
Sa maman avait quatre sœurs, toutes parties s’exiler en France voisine.
Après la mort de son mari, lors de la deuxième guerre mondiale, sa tante Mathilde revint en Suisse et s’établit dans les montagnes neuchâtelloises.
Les trois tantes restantes, devenues françaises et veuves, il ne les connaissait pas sauf… Tante Rose qui habitait Paris et qui, très occasionnellement, venait rendre visite à ses deux sœurs restées suissesses.
« Tiens, c’est un cadeau pour toi, mon petit-neveu (elle parlait comme on parle là-bas en France), c’est une Tour Eiffel et si un jours tu viens me trouver, je t’y emmènerais.
- Maman, Maman, quand on ira à Paris, j’veux habiter tout en haut de la Tour Eiffel ».
- C’est ça mon petit, mais pour cette année tu iras en vacances chez Tante Mathilde à la Chaux-de-Fonds ». -
Le quatrain de la semaine
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Les petites histoires de Gabby: 62.LE CUL
Sébastien ne paie pas de mine. Il est tellement comme tout le monde que personne ne fait attention à lui. On ne le méprise pas. Il n’est pas mis au ban de la société. Il est tout simplement là, parmi la foule des anonymes, à vaquer parmi tant d’autres anonymes. Parlant de ces gens-là, Guy Béart les avait appelés « quidam » dans une de ses chansons.
Sébastien est, comme on dit de par là-bas, un garçon tout à fait normal qui s’intéresse normalement aux filles.
Dans les questions qu’ils abordent entre copains, à propos des filles, il y a souvent celle-ci : « Qu’est-ce t’aimes le plus chez une fille ? »
« Ben moi, c’est les yeux, c’est sûr. Ils reflètent l’intérieur et j’aime pouvoir y regarder comme dans un puits d’eau claire », avait dit l’un avec sa ferveur poétique.
« Moi, j’aime surtout les jambes. Longues, longues… très longues qui indiquent le chemin vers le paradis » a répondu un autre camarade tout autant poète que demandeur.
« J’aime les seins », soupire un autre – « tous les seins. Petits, gros (un peu, pas trop), en forme de poire ou de préférence en forme de pomme. Quoi de plus doux que de caresser ces petites montagnes faites pour plaire à mes mains ? »
« Moi, j’aime les culs », avait lancé Sébastien à la ronde. « On dit les fesses » lui rétorqua-t-on.
- « Moi, j’aime dire « cul ». C’est plus sensuel et puis l’autre soir, j’ai caressé les fesses de ma copine avec douceur et elle m’a dit : « Tu aimes mon cul ? »
- «Je n’ai plus que ce mot au bout de mains. Les fesses… c’est pour les dames de la haute ! » -
Le quatrain de la semaine
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Les petites histoires de Gabby: 61.LA COMPTINE
La vie est belle quand les choses se font comme elles doivent se faire… naturellement. Papa est devenu grand-papa et la vie continue… naturellement.
Grand-papa a déjà deux petits-enfants : Tristan et Benoît. C’est de Tristan que Grand-papa s’occupe souvent. Benoît, le deuxième est encore trop petit. Les langes, le biberon, pour Grand-papa, c’est du passé.
Tristan va au jardin d’enfants dans le quartier voisin. Grand-papa se souvient qu’à la fin du premier jour, Tristan avait dit « J’ai pas vu de légumes ! »
- « C’est vous les enfants qu’on va chouchouter, câliner et aider à pousser, à grandir comme de petits légumes » avait dit sa maman avec un grand sourire de mère poule toujours attentive à ses rejetons.Grand-papa allait une fois par semaine conduire Tristan vers ce jardin où les enfants poussaient bien. En chemin, Grand-papa chantait toujours de petites comptines à Tristan qui les apprenait très vite.
Grand-papa qui s’y connaissait bien en chansons pour les enfants composa avec son petit-fils la comptine suivante :
Avec des noix d’coco
J’ai fait des castagnettes
Avec des haricots
J’ai rempli une assiette
J’ai mangé tout le plat
Et je suis grand comme ça.Il y a déjà longtemps de cela et ils la chantent toujours.